Sean Murphy est en chaise roulante, il ne peut bouger ni ses jambes ni ses membres supérieurs : « Mes muscles ont décidé de démissionner. J’essaie de concentrer mon énergie sur les 5, 10 ou 15 % de positif au lieu de me concentrer sur les aspects physiologiques que je ne maîtrise plus. » Et pour cause, Sean Murphy, 58 ans, est atteint de sclérose latérale amyotrophique, également connue sous l’appellation de maladie de Charcot : « On ne sait pas grand-chose de cette maladie aujourd’hui, relate-t-il. On ne peut pas trouver la cause et guérir. »
Pour Sean Murphy, la découverte de cette pathologie remonte à près de 20 ans en arrière : « Ma vie a changé en 2004, dès les premières manifestations visuelles de cette maladie. (…) A cette époque-là, on m’a annoncé un peu sèchement que j’avais entre 3 et 6 mois à vivre. C’était assez choquant. » En effet, le nom barbare de cette cruelle affection n’a d’égal que le pronostic létal qui lui est généralement associé. Atteignant les fonctions motrices jusqu’à une complète paralysie sans péjorer la conscience, elle s’ensuit du décès de la personne touchée, généralement par asphyxie, entre 6 et 24 mois après le diagnostic.
Une forme atypique de la maladie
Non d’accord de « lever le pied », comme il le dit lui-même, Sean Murphy est toujours en vie 19 ans après l’annonce de son diagnostic : « C’est plus agréable à vivre que de mettre en place tous les préparatifs pour mourir. » Il fait alors la connaissance du Prof. Julien Bogousslavsky, neurologue, qui le suit depuis maintenant 10 ans à la Clinique Valmont de Glion. « C’est le professeur qui a été le premier à me donner un certain espoir. »
Son médecin lui diagnostique une forme atypique de cette pathologie, expliquant son espérance de vie défiant tous les pronostics : « Dans la forme classique de cette maladie qui touche les neurones moteurs, explique le Prof. Bogousslavsky, les deux types de neurones sont touchés. Chez mon patient, j’étais frappé que seuls les motoneurones périphériques étaient touchés, sans atteinte cérébrale. Donc la maladie est différente dans son évolution. »
De l’importance du soutien moral
Sa maladie répondant à certains traitements qui ne sont habituellement d’aucune efficacité dans la maladie de Charcot, Sean Murphy intègre un essai clinique aux États-Unis grâce à son médecin. « Même si la situation s’est dégradée, raconte ce dernier, cela lui permet quand même de travailler à 100% ce qui est incroyable. » Sean Murphy occupe en effet un poste de haut cadre chez Nestlé à Vevey. Une situation rendue possible grâce aux aménagements technologiques, au soutien obtenu auprès de son employeur et à l’équipe qu’il a mise en place autour de lui à domicile, constituée de thérapeutes et d’auxiliaires de vie : « Sans eux, je ne serais pas là. C’est aussi simple que ça. Cette notion de l’aide et du soutien est l’élément fort. Il ne faut pas s’isoler. »
Et le Professeur Bogousslavsky de rappeler le difficile rôle du personnel soignant dans le cas d’une maladie incurable : « Cette maladie effraie les médecins car on est confronté à sa propre insuffisance d’une certaine façon, explique-t-il. Il y a cette impuissance qui se profile immédiatement derrière le contact. Pourtant, c’est utile de continuer à voir un patient même si on n’a pas un traitement qui guérit. » Cette attitude lui vaut le respect et la reconnaissance de son patient : « Je dis merci au Professeur. »