Episode 11

Endométriose : une gynécologue-sexologue aide sa patiente à se sentir femme après une hystérectomie

En 2023, Celine Ella Vez a pris une décision radicale : subir une hystérectomie, autrement dit une ablation de l’utérus. Selon ses médecins, cette opération représentait le seul moyen d’en finir avec des douleurs chroniques handicapantes et des saignements dus à de l’adénomyose, une forme d’endométriose. Sans enfant et en couple, cette patiente de 41 ans a donc dû renoncer à certains projets de vie et reconsidérer son vécu en tant que femme. Pour l’accompagner sur ce chemin, elle s’est adressée à la Dre Decaillet, gynécologue et sexologue à Bienne. Dans son cabinet, elle lui propose une approche personnalisée et holistique pour appréhender sa vie post-opération.

Modération de Vicky De Paola

25.10.2023

Il y a trois mois, Celine Ella Vez s’est présentée à la consultation de sexologie de la Dre Sarah Decaillet, cheffe de clinique de gynécologie et obstétrique et responsable médicale du centre de santé sexuelle au Centre Hospitalier Bienne. A ce moment-là, cette patiente de 41 ans venait de subir une hystérectomie totale, autrement dit une ablation de l’utérus.

A l’origine de cette opération, une pathologie appelée adénomyose, soit une forme d’endométriose provoquant des saignements abondants, y compris en dehors des règles, et des douleurs chroniques nuisant à la qualité de vie. Celine Ella Vez raconte : « J’étais angoissée à l’idée d’avoir mal. Je me suis évanouie plusieurs fois, notamment dans un train, une autre fois quand j’étais debout et que je ne pouvais pas m’asseoir. Souvent, on nous dit que c’est normal que nos règles soient douloureuses. Mais aussi loin que je me souvienne, à 13 ans c’était déjà atroce. J’avais des douleurs en continu et des saignements très importants. »

Si l’opération l’a libérée de ses douleurs, Celine Ella Vez est restée avec beaucoup de questions sur le sens de cette intervention. Elle a notamment dû faire le deuil d’une grossesse : « J’ai dû faire un travail là-dessus avant l’opération, raconte-t-elle. Il a fallu expliquer à mon entourage que oui, j'aurais souhaité avoir des enfants, mais que je peux aussi avoir une nouvelle vie sans enfant. Et je suis très heureuse aussi parce que la douleur était arrivée à un tel stade que la question ne se posait plus. Enfant ou pas, il fallait vraiment que je trouve une solution pour guérir. »

Sur le chemin de la guérison

Aujourd’hui, Celine Ella Vez parle donc de son opération comme d’une libération, une « renaissance » : « Je peux clairement dire que je revis. C'est comme si je vivais une deuxième vie sans douleur. »  Pourtant, c’est seulement après son hystérectomie que le diagnostic a véritablement pu être posé : « Il y a peu de tests à l'heure actuelle qui nous permettent d’établir un diagnostic de certitude, explique la Dre Decaillet, à part l'étude des tissus. Et pour ça, il faut soit pouvoir faire un prélèvement ou, dans le cas de l’adénomyose, ausculter la pièce anatomique [NDLR : après ablation]. C'est pour cette raison qu'il y a souvent une grande errance diagnostique et que les patientes ont le sentiment de ne pas être entendues, comprises ou crues. Et puis, ça crée une relation assez difficile entre les patientes et leur corps, mais aussi au sein de la relation avec les médecins. »

D’où le besoin pour Celine Ella Vez de bénéficier d’un espace de parole au cabinet de sexologie de la Dre Decaillet. Grâce à sa double casquette de sexologue et de gynécologue, cette dernière accompagne sa patiente pour l’aider à revenir sur son parcours de soins et son expérience en tant que femme. « En fait, tout le concept de cette consultation, détaille la Dre Decaillet, c'était un petit peu de sortir du côté très médicalisé, classique de la consultation de gynécologie (…). Ce qui est intéressant ici dans cette consultation de sexologie, c'est qu’il n'y a pas de chaises de gynécologie. Il y a des plantes vertes, on boit du thé, on s’assoit et on parle de ce que cette opération signifie pour ma patiente, de ce que cela lui fait et de comment elle souhaite aborder les choses après. »

Il est également prévu que la Dre Sarah Decaillet devienne la gynécologue référente de Celine Vez à l’avenir. « On a réfléchi ensemble au type de suivi qu’elle voudrait, détaille la médecin. On se prépare ensemble en parlant du type d’examens à réaliser, de la façon d’y procéder et de la façon d’appréhender le toucher pendant les contrôles. L’idée est de lui proposer un suivi sur mesure et participatif lui permettant d’être soignée tout en restant autonome et respectée. » Une approche qui convient parfaitement à sa patiente, laquelle explique bénéficier d’un espace de parole bienveillant : « C'est un moment de partage extraordinaire parce que ça nous permet d'être libres de m’exprimer, de parler de mes peurs, de mes besoins, de mes envies. C'est un cocon où on prend le temps. »

Prendre le temps

Car, comme le rappelle la Dre Sarah Decaillet, les médecins subissent l’injonction légale et politique de soigner en peu de temps. Dans ces conditions, le défi consiste donc, selon elle, à créer du lien avec un-e patient-e en utilisant peu de mots et en les choisissant bien. D’autant plus que la gynécologie est un domaine ayant trait à l’intimité, comme le rappelle Celine Ella Vez : « Se mettre nu lors d'un contrôle gynécologique, c'est quand même compliqué. »

D’où l’importance, selon son médecin, d’avoir l’occasion d’aborder ces questions en dehors du cabinet de gynécologie ou avant l’auscultation : « Le fait de pouvoir avoir une discussion avant et de préparer la personne à l'auscultation est très important, explique-t-elle. Dans mon cas, c'est quelque chose qui est important et qui m'aide aussi en tant que professionnelle. (…) Oui, ce sont les patients qui m'apprennent comment être un meilleur médecin. »

Dre Sarah Decaillet avec Celine Ella Vez

Dre Sarah Decaillet avec Celine Ella Vez

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